Du
12 octobre au 16 novembre 2002 s'est déroulé à la Maison
de la culture du Japon à Paris l'un des événements cinématographique
les plus attendus de cette année. Aux sources de l'animation japonaise
: des années 20 aux années 50, nous fait comprendre en 47 films
d'où vient la vitalité du cinéma d'animation japonais contemporain.
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LES PIONNIERS ---
En 1910 les japonais voient apparaître
les premiers films d'animation, il s'agit des productions de l'américain James Stuart Blackton et du français Emile Cohl. Ces films
ont à cette époque un tel succès, que la société Tenkatsu
charge un célèbre caricaturiste de l'époque de créer le premier court
d'animation japonaise, et c'est en janvier 1917 qu'apparaît sur
les écrans Le portier Imokawa
Mukuzo de Shimokawa Ôten. Quatre mois après c'est La guerre des singes et des crabes,
le premier film d'un autre pionnier Kitayama Seitaro qui est projeté
sur les écransjaponais. C'est toujours en 1917 que le troisième pionnier,
qui sera le premier à utiliser des contrastes dans le noir et blanc, Kouchi
Jun'ichi sort Le sabre flambant neuf
De Hanawa Hekonai .
Ensuite, la production japonaise
s'accélère, et c'est en mars 1918 que le film Momotarô,
l'enfant né d'une pêche de Kitayama crée un tel événement
qu'il sera le premier dessin animé à être présenté en France en décembre
de la même année. Le premier programme présenté dans le cadre de cette
rétrospective commence en 1924 et nous présente notamment l'une des aventures
de Momotarô réalisé par Yamamoto Sanae, on pourra aussi voir du
même auteur une adaptation du lièvre et de la tortue, aux formes très
stylisées.
Le lièvre et la
tortue [Usagi to kame] / Sanae Yamamoto / muet / 1924
L'un des films qui parlera sans doute
le plus aux amateurs d'animation japonaise contemporaine c'est La
bouilloire magique (1928) de Murata Yasuji, dans lequel
un raton laveur sauvé d'un piége par un pauvre paysan décide de se transformer
en bouilloire pour l'aider, mais le paysan ne sachant qu'en faire l'offre
au temple. Là le raton créera tout une série de catastrophe. Les moines
rendent la bouilloire/raton au paysan. Pour se faire pardonner il lui
propose de fonder un cirque pour faire fortune. Tous ces courts souvent
bénéficient d'une très belle animation. Et il est à noter que les dialogues
s'inscrivent en même temps que l'action sur l'image et non pas en intertitre,
ce qui ancre l'animation japonaise dès le début en dérivé de la
bande dessiné.
--- TROIS GRANDS
MAÎTRES DES ANNEES 30 AUX ANNEES 50 ---
Les trois programmes suivant nous
montrent les films de trois réalisateurs fondamentaux de l'animation japonaise,
qui de par leur talent et leurs innovations influenceront les créateurs
qui commenceront dans les années 50-60. Le premier programme est dédié
à Ôfuji Noburô, assistant de Kôuchi. Il est connu pour avoir
réalisé la première animation japonaise d'ombres chinoises La
baleine, qui fut présenté en France en 1928. Le même film dans
sa version couleur sera présenté au festival de Cannes en 1953. Et en
56 son film Le bateau fantôme obtient
le prix spécial du jury à la Mostra de Venise. La qualité technique de
ses réalisations est très impressionnante. Le second nous fait découvrir
Murata Yasuji grâce notamment à deux petits chefs d'œuvres l'un
de 1929 : Tarôbee chez les lutins.
L'histoire : un bûcheron s'endort dans un tronc d'arbre et, à son réveil,
aperçoit des lutins jouant de la musique ; il se met alors à danser. Ceux-ci
surpris par son talent, décident de le récompenser en lui enlevant la
verrue qu'il a sur la joue gauche. Son voisin, qui lui, a une verrue sur
la joue droite, et à qui il raconte son histoire, va tenter sa chance,
mais c'est un piètre danseur et il finira avec une seconde verrue. L'animation
en ombres chinoises et papier découpé est une merveille. En 1930 il réalise Le
singe Masamune. Dans ce film un messager sauve la vie d'un
singe des mains d'un chasseur qui pour le remercier lui offre un sabre
magique. Dans ce film non seulement
l'animation est réussie mais la mise en scène commence à prendre une réelle
importance grâce à de très beaux mouvements, comme un travelling sur le
messager acceptant le sabre puis s'en allant, porté par les singes.
Le singe Masamune
[Saru Masamune] / muet / 1930 / 10'
Le programme suivant est dédié à
celui que beaucoup considèrent comme le père de l'animation japonaise:
Masaoka Kenzô . Ce dernier met en
place des structures nouvelles pour l'animation japonaise. Premier réalisateur
à faire un film sonore, il est aussi celui qui utilisera très rapidement
le cellulo à l'américaine plutôt que les techniques utilisées jusque là.
Au travers de films comme L'araignée et la tulipe (1943) ou bien
Féerie de Printemps (1946) on se rend compte de ce qu'il a pu apporter,
même si on peut ne pas être sensible à son imaginaire et son style souvent
assez proche d'un Walt Disney.
--- LA GUERRE ---
Le programme suivant nous présente
d'autres réalisateurs de cette période, avec des films fort réussis comme
La chasse au monstre (1935) de Kataoka
Yoshitarô ou bien Le
renard contre les ratons (1933) de Ôishi
Ikuo, et le film L'amour de Sankichi et Osayo
du réalisateur Seo Mitsuyo qui créera
le premier long métrage d'animation (37 mn) : Les aigles marins de
Momotarô (1943), film de propagande militaire sur Pearl Harbor. Il
récidivera en 45 avec un film d'une durée de 74 min., Momotarô dieu
des flots, toujours de propagande, mais qui touchera peu de spectateurs,
les salles ayant été en grande majorité détruites par les
bombardements, mais il éveillera des vocations chez des jeunes, et notamment
le futur maître Tezuka Osamu. Le programme suivant est très surprenant,
il y est question de la production de films de propagande et il faut remarquer
que celle-ci est moins belliqueuse que les productions américaines de
l'époque. Dans ces films, les japonais gagnent grâce à leur supériorité,
et caricaturent rarement l'ennemi comme le faisait la majorité des films
américains. Le dernier programme sur l'après
guerre on notera surtout le film Le crayon magique (1946) de Kumagawa
Masao, qui raconte l'histoire d'un garçon qui répare une poupée
occidentale, et celle-ci pour le récompenser lui offre un crayon qui exauce
ses souhaits. Il décide alors de reconstruire sa ville, son pays tout
en scandant "Thank you very much !"
Le crayon magique [Mahô no pen] / Masao Nogawa / 1946 /11'
Comme vous aurez pu le comprendre
cette rétrospective était très dense, et il ne fallait pas la
manquer. Mais rassurez- vous, et notez le dès à présent,
on devrait pouvoir les revoir en juin-juillet de l'année prochaine
lors de la suite de la rétrospective.
Alexis Hunot